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Nottaway Plantation

Bienvenue aux États-Unis > Louisiane > Suivez Jacline à la Nottoway Plantation

Situé à 18 milles de Bâton Rouge et à 45 milles de la Nouvelle-Orléans, juste après avoir passé le bayou Gouls ... c'est Nottoway, la plus grande plantation du Sud. Comme surgi d'un conte, le manoir est entouré d'arbres centenaires aux troncs imposants. Son toit couvre 53 000 pieds carrés, supporté par 22 colonnes. À l'intérieur, on compte 64 pièces. L'architecture est un mélange de style grec et italien. Le manoir fut construit d'après les plans du célèbre Henry Howard pour John Hampden Randolph, un homme respecté qui a fait fortune avec ses plantations de canne à sucre. Les portes de bois sculpté furent ouvertes en 1859 et les 200 fenêtres furent éclairées de mille bougies.

Si Nottoway existe toujours, c'est grâce à un officier qui s'opposa à sa destruction lors de la Guerre en y établissant ses quartiers généraux.
Il pleuvait "des cordes" depuis le matin. Dans les champs, le coton était frileux sous les feuilles humides qui avaient plaqué le duvet. Même le soleil de l'après-midi n'avait pas réussi à ébouriffer les pompons blancs. Malgré notre hâte d'arriver à Nottoway, tels des enfants faisant l'école buissonnière, nous avions étiré notre route et pris un chemin qui coupait parfois les champs de coton. Nous roulions dans ces espaces oscillés de blanc, baignés de paix en ce déclin du jour. Nous avancions entre des rangées d'arbres qui, au fil du temps, s'étaient développés en parfaite harmonie et formaient une large avenue.

La lune apparut! ... La clarté se faufila à travers les feuillages couvrant d'ombres l'allée de terre au bout de laquelle le manoir se tenait, orgueilleux et invitant. Un homme attendait notre arrivée sur la véranda, assis dans une immense berceuse de rotin cachée par un bougainvillée violet qui montait à l'assaut de la balustrade. Deux lévriers dormaient aux pieds de leur maître, patients et bien éduqués. Le bruit de l'auto réveilla le trio. Le propriétaire vint à notre rencontre et nous souhaita la bienvenue.

La nuit était tombée et les rideaux de soie n'avaient pas été tirés, laissant deviner qu'à l'intérieur de cette magnifique demeure un passé nous serait bientôt raconté.

Suivant la tradition, une servante apporta un cabaret d'argent avec des coupes de vin pétillant ... une boisson délicieuse qui a le don de délier les langues et de faire battre les coeurs. Une brise légère s'éleva, agita le fanal sous le porche et y délogea un papillon de nuit; notre hôte nous pria d'entrer.

Nottaway Plantation 1

Je portais une robe de coton brodé blanc, longue à la cheville et j'avais, pour cette visite, relevé mes cheveux et en avais fait un chignon. Dès les premiers pas, dans le hall feutré, je m'éloignai du groupe, écoutant, distraite, les explications données afin de vivre seule et à ma façon cette belle histoire. Perdue dans mes pensées, je remontais le temps, admirant les lambrequins, les corniches aux appliqués de bronze. Je m'attardais dans le salon où les femmes, à cette époque, brodaient, faisaient de la tapisserie tout en croquant des sucreries rares. Je m'imaginais entendre le froufrou de leurs crinolines, le bruissement du taffetas ... je rêvais! Sur le manteau de la cheminée, une horloge de porcelaine s'étaient endormie pour avoir trop longtemps marqué les heures dans cette maison. Heures tristes, heures joyeuses, heures d'angoisses! Ses aiguilles marquaient 3 heures. Pourquoi s'était-elle éteinte ce jour-là!

Triste, je continuai ma visite; un long corridor rempli de photos m'amena à un petit salon qui jouxtait une chambre à coucher. Les murs étaient couverts de papier peint rose imprimé de fleurs de lilas. C'était, à n'en pas douter, la chambre d'une jeune fille. Un miroir me renvoya mon image et bouscula la réalité. Mes yeux firent le tour de la pièce et se posèrent sur une photo jaunie. Je tendis une main hésitante et regardai de près ce sourire, ces yeux ... avait-elle été heureuse? Pour quelle occasion portait-elle ce chapeau de paille? Son passé lui appartenait et je replaçai, confuse, le cadre sur la table à côté de l'album que je n'ouvris pas.

Nottaway Plantation 1

Un coup d'œil à ma montre me ramena à la réalité ... mais lorsque je descendis le grand escalier, je replongai dans le temps et m'imaginai être Scarlett O'Hara. Hélas, personne ne m'attendait lorsque ma sandale se posa sur le tapis usé. Je rejoignis les invités dans la salle de bal. La chaleur du feu dans la cheminée chassa les frissons que je ne parvenais pas à dissimuler. J'avais l'impression d'entendre les balles siffler à mes oreilles.

Le propriétaire en était à ses dernières explications. Je me sentais comme une élève indisciplinée arrivant en retard à un cours. En parfait gentleman, il fit mine de m'ignorer. La musique, comme venue d'un orchestre invisible, enveloppa la salle. Devinant mon esprit romantique, avec galanterie, il m'invita à danser. Trop vite on annonça le souper. Une femme, à la peau noire, portant robe foncée, tablier amidonné, se tenait à la porte de la salle à dîner - on aurait dit Aunt Gemina sortie de ma boîte de mélange à crêpes. Quel ravissement! La décoration était à couper le souffle. Si imposante! La table avait pris l'allure des grandes réceptions. Les assiettes, disposées sur la nappe de dentelles, brillaient de toutes leurs gravures. Le plafonnier mettait des reflets tendres sur les cuivres et les bougies scintillantes donnaient des reflets dorés sur le cristal. Au dehors, le chant des cigales arrivait jusqu'à nous et se mêlaient à nos conversations, pénétrant par les larges porte-fenêtres en même temps que le parfum des bougainvillées.

Au Menu, un repas typique des plantations, comme on le sert encore dans les familles cajuns, les mêmes vieilles recettes de l'époque ...

Gâteau de crabe noir sur aubergine
Bouchées de boudin
Soupe aux okras
Alligator des bayous en sauce piquante
Étouffée d'écrevisses
Pouding au pain, sauce au rhum
Tarte aux pacanes des Plantations

Lorsque nous quittâmes notre hôte pour regagner la limousine, un chat sorti, on ne sait d'où, vint avec gentillesse promener son nez sur l'ourlet de ma robe. Taquin, il joua avec les rubans puis, bombant le dos pour avoir une caresse, fila ensuite, heureux, vers le manoir. Les chiens vinrent gambader autour de nous, poussèrent quelques jappements en guise d'adieu et partirent dociles, dormir dans leur niche.

La route était presque déserte. Nous étions silencieux, imprégnés de ce passé, résistants au présent. Une lune complice éclairait les champs de coton, s'attardant à nous donner un spectacle féerique, un "lagniappe" à une journée mémorable.

Lorsque, revenue à mon hôtel, la fleur de laurier rose que j'avais piquée dans mes cheveux tomba ... j'eus la certitude que j'étais née ... un siècle trop tard!

 
 
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