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Suivez Jacline au Sénégal

Bienvenue au Sénégal > Suivez Jacline > La brousse m'avait au cœur!
J'arrivai à ma case en fin de journée dans un des villages Foulahs. Dès que vint le soir, tout fut transformé. Un cri, puis d'autres et d'autres vinrent briser le silence de cette nuit sans lune. Ce n'était ni des oiseaux apeurés, ni des sangliers s'enfuyant avec fracas. De jeunes garçons étaient circoncis dans la forêt. Aux premières lueurs du matin, ils étaient devenus des hommes. Le ronron du moteur du petit avion qui me ramenait à Dakar n'arrivait pas à m'étourdir. J'avais mal pour les enfants, pour les mères de ces enfants mais que peut-on faire contre une tradition millénaire.

Le lendemain, je pris une barque pour l'île de Gorée. J'avais hâte de retrouver Mimi et Maurice, propriétaires de l'Hostellerie du Chevalier de Boufflers que j'avais connus lors de mon précédent voyage. Je retrouvais avec joie, dans le livre d'accueil les lignes de mon dernier passage. Mimi me fit servir du gnou en grillade avec du riz, du vin en pichet, de grands biscuits et des fruits.

Je laissai mes hôtes relativement tôt avec promesse de revenir car le jour suivant, je partais en grande excursion à travers le Parc National de Niokolo Koba afin de poursuivre mon voyage sur le delta du fleuve Saloum. En attendant la barque de retour, je m'achetai des sandales en peaux de girafe.

Après le petit déjeuner à l'hôtel Savana, nous prîmes la route menant à M'Bour en longeant la forêt de baobabs. Le trajet était féerique! La route s'incurva vers le sud-est et nous passâmes à Kaolack, - un ancien comptoir commercial à l'époque coloniale, aujourd'hui capitale de l'arachide - Kouncheiut, et nous arrivâmes pour dîner à Tambacounda, capitale du Sénégal oriental qui compte plus de 20 000 habitants, située au carrefour des grands axes conduisant au Mali et à la Guinée. Quel délicieux repas! Ma gourmandise fût satisfaite car le chef prépara pour moi un steak de sanglier, ayant été averti de mon allergie pour tous les poissons. Nous arrivames au campement-hôtel en fin d'après-midi. En attendant le repas du soir, je comptai les chauves-souris encore endormies aux poutres du salon et je me couchai tôt ... évitant de regarder le plafond.

Dès l'aube, nous partîmes en safari en véhicule tout terrain dans le parc du Niokolo où la savane alterne avec la forêt. Moins connu que ceux du Kenya et de Tanzanie, ce parc couvre 813 000 hectares. Prиs de 70 espиces de mammifиres, 330 espиces d’oiseaux et 60 espиces de poissons et reptiles vivent dans cette zone protйgйe. La jeep roulait et chacun essayait d'apercevoir lions, léopards, lycaons. Parfois une gazelle traversait la piste, pressée vers nulle part. Un hippopotame lancait une gerbe d'eau. Le temps filait sans que je m'en rendis compte mais lorsque le tout terrain s'immobilisa devant le campement, je descendis la dernière, entrai dans ma case et m'endormis, épuisée, d'un sommeil lourd.

Le lendemain, la cloche du déjeuner me réveilla alors qu'il faisait encore noir. L'odeur du café me guida jusqu'à la salle à manger. Avant que la barre du jour paraisse à l'horizon, nous devions avoir traversé le parc afin d'y admirer les animaux encore sommeillants. C'est l'habitat naturel du lion, de l'éléphant, de l'hippopotame, du buffle, de l'élan de Derby (énorme!) et des plus grosses antilopes du monde; on y trouve aussi quelques fauves, des singes, des oiseaux de toutes les couleurs et, bien sûr, des girafes. Plus de 70 espèces y sont recensées. C'était aussi humer ces odeurs matinales aux parfums ensorcelants et, aux premiers rayons du soleil, nous diriger vers la province de Sine Saloum, un dédale de bras de mer, de bolons et de marigots en empruntant la route pendant quelques kilomètres, bordées de palétuviers puis la piste cahoteuse menant à Fadiouth vers le village-hôtel des Piroguiers constitué d'une vingtaine de bungalows.

Des heures en pirogue afin de survivre
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Je suivais l'itinéraire lorsque soudain j'eus une forte nausée. Tout devant moi devint flou. Je sortis ma tête hors de la Jeep pour mieux respirer. Lorsque je repris conscience, les autres passagers se mêlaient aux femmes du village et je sentis que mon état n'avait rien de rassurant. Supportée par mon guide Chimba, je réussis à m'allonger sur les herbes au bord de la route. Des douleurs atroces au ventre me firent encore perdre conscience. Des odeurs de poisson me ranimèrent mieux que des sels mais ciel que c'était écoeurant! Je vis alors Chimba discuter avec un personnage effrayant, grand, squelettique, édenté. En apercevant le sorcier, je crus ma dernière heure venue et je m'évanouis à nouveau. C'est le clapotis des vagues qui me ramena à la réalité. Nous avions atteint l'autre rive. Pendant des heures, Chimba avait lutté pour ma survie et , dans une pirogue taillée dans le bois d'un fromager, il m'avait conduit chez le médecin de brousse. Je criai de douleur lorsqu'il m'administra une piqûre dans la fesse. Chimba riait de toutes ses belles dents, soulagé et un petit singe sautillait de joie à ses côtés. J'étais dans une position terriblement gênante et, quoique très faible, j'essayai de remonter mon pantalon. C'est alors que j'appris que j'avais été transportée chez le vétérinaire, l'homme qui soignait les bêtes blessées. La seringue vide sur la table n'avait rien de rassurant. Dans la brousse, on n'attend pas d'être remis sur pied et, malgré ma faiblesse, Chimba me ramena à la pirogue et rama en sens inverse vers Fadiouth, l'île merveilleuse face à Joal, la ville natale de Senghor, un petit village de pêcheurs dont le sol est uniquement constitué de coquillages. De là on reprit la route en direction de l'hôtel, mon "sorcier" nous servant de chauffeur!

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À l'hôtel, ce fut la fête et le dîner d'adieu qui clôturait un de mes périples africains. Chimba tint à venir à l'aéroport et lorsque je l'embrassai, ses joues sombres prirent une teinte rosée. Je m'excusai de cet élan plein de reconnaissance. "Ma peau est noire mais mon cœur est rose comme le tien" me dit-il. Lorsque je m'embarquai à Dakar sur le vol RK 049, j'ignorais que je transportais clandestinement un insecte dans mon nombril, responsable de tous mes maux. Un médecin consulté à l'unité des maladies tropicales, à mon retour à Montréal, retira cet intrus qui c'était nourri de mon sang pendant quelques jours. Il repose maintenant à l'hôpital Sacré-Cœur dans un petit bocal.

Informations géographiques

Niokolo Koba
situé au sud-est du Sénégal, entre les provinces du Sénégal Oriental et de la Casamance, à 600 km de Dakar. Le parc couvre une superficie de 813 000 hectares. Le parc est traversé par plusieurs rivières.

Île de Gorée
Cette île, découverte en 1444 par le capitaine portugais Dinis Dias, fut, pendant trois siècles, un centre de traite d'esclaves.

Fleuve Saloum
4e grand fleuve sénégalais. À l'approche de la mer, il se transforme en un immense delta parcouru de belons - bras de fleuve qui déterminent plusieurs concentrations de petites îles, désertes pour la plupart - les seuls habitants sont les flamands roses, le hérons et les cormorans.

Fadiouth
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Cette île est reliée par deux ponts en bois de 800 mètres de long balayés à chaque marée par un vent revigorant. La naissance de l’île d’après les vieilles histoires des anciens du village aurait pour origine les déchets de coquillages accumulés par les villageois. En effet, les femmes pêchent des coquillages qu’elles font ensuite sécher. Aujourd’hui encore cette pêche existe et les coquilles sont conservées pour être mises dans les rues. Le résultat est une île constituée de couches de coquillages centenaires. Le sol d’un blanc éclatant craque à chaque pas.

 
 
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